Ce texte hommage a pour but de saluer l’importante contribution de Rachel Bélisle, depuis 2003, à la fondation et à la réalisation des travaux de l’Équipe de recherche sur les transitions et l’apprentissage (ÉRTA), devenue le CÉRTA en 2009. Au début des travaux de l’ÉRTA, Rachel Bélisle a notamment laissé sa marque dans les notes méthodologiques et éthiques, à la rédaction desquelles elle a largement contribué. Ces notes vont de pair avec une certaine vision de la recherche qui aspire à rendre transparentes et accessibles les opérations intellectuelles de production et d’analyse des données de terrain, de même qu’à saisir les précautions éthiques à prendre avant, pendant et après la conduite de toute enquête de terrain. Ces notes ont aussi contribué à la formation à la recherche des étudiantes et étudiants qui en ont pris connaissance, soit pour saisir la méthodologie d’un projet du CÉRTA auquel leur propre projet se greffait, soit pour saisir les exigences concrètes de toute méthodologie en recherche.

Des contributions de Rachel Bélisle, il faut sans conteste mentionner celles relatives aux travaux majeurs qu’elle a menés avec des collectifs, ainsi qu’avec des étudiantes et étudiants sur l’écrit et la reconnaissance des acquis, parfois en conjuguant ces deux objets de recherche.

Pendant les vingt dernières années, Rachel Bélisle a significativement contribué au développement du champ de la recherche sur les pratiques de l’écrit des adultes en situation de précarité, dont les adultes sans diplôme. Ses travaux sur les pratiques de l’écrit, le rapport à l’écrit et la création et l’animation des environnements écrits ont permis de faire contrepoids aux résultats des grandes enquêtes internationales sur la littératie des adultes. Les travaux de Rachel Bélisle dans ce champ ont contribué à constituer un corpus de textes scientifiques qui, pour reprendre une expression (et une épistémologie) chère à la chercheuse, font une “lecture en positif” de ce que les adultes font avec le langage écrit. Ses travaux ont également ouvert des pistes de réflexion et d’interventions pour les milieux de pratique. On doit aussi reconnaître les constantes préoccupations d’ordre épistémologique et méthodologique de Rachel Bélisle dans la conduite de la recherche, dont celle sur l’écrit. Sur ce plan, la chercheuse a été l’une des pionnières francophones à tisser des ponts avec le courant des New literacy studies, à aller à la rencontre des chercheuses et chercheurs de ce courant et à traduire certains de leurs concepts. L’ensemble de ces travaux ont influencé plusieurs étudiantes et étudiants aux cycles supérieurs et membres du CÉRTA qui se sont intéressés à ce que les adultes font avec l’écrit en formation, en emploi ou dans la vie courante, mais aussi à la présence de l’écrit dans les processus de reconnaissance des acquis, ce qui est certainement un trait distinctif des travaux de Rachel Bélisle.

Les travaux de Rachel Bélisle s’inscrivent dans une perspective d’apprentissage tout au long et tout au large de la vie. Les travaux qu’elle mène depuis ces dernières années en reconnaissance des acquis et des compétences (RAC) ont permis de documenter, en autres, les parcours des adultes et de soutenir les milieux dans le déploiement de ces dispositifs pour un meilleur accès aux adultes. Ses travaux inspirent tant les personnes praticiennes que les décideurs politiques, ce qui témoigne une fois encore de l’ancrage des travaux de Rachel dans les enjeux sociétaux actuels et sa sensibilité aux besoins des milieux de pratique.

En janvier 2023, Rachel Bélisle a pris sa retraite comme professeure régulière. Toutefois, ce terme ne représente pas précisément sa situation, laquelle relève davantage de la transition professionnelle. Après près de 20 ans comme professeure à l’Université de Sherbrooke, Rachel Bélisle reste active en recherche dans le domaine de la RAC à titre de consultante et de professeure associée au Département d’orientation professionnelle. De nos vœux, nous souhaitons poursuivre les collaborations avec la professeure Rachel Bélisle, mais au rythme qui lui conviendra.

Merci Rachel pour ta constance et ta générosité dans ton enseignement, dans la conduite de recherches rigoureuses et respectueuses des enjeux éthiques, ainsi que dans l’expression de ta solidarité à toutes les dimensions de la vie du CERTA.

Jean-Pierre Mercier, chercheur associé du CÉRTA et professeur agrégé à l’UQÀM, Isabelle Rioux et Évelyne Mottais, membres étudiantes du CÉRTA et doctorantes en éducation.